L'avènement des applications de santé mobiles, de la télémédecine et des objets connectés, autorise désormais l'échange des données de santé. Mais les patients utilisateurs de ces technologies digitales sont-ils disposés à partager ces morceaux de leur vie privée avec les acteurs du monde médical ? Oui, nous disent plusieurs études récentes. Mais à certaines conditions.
L'avenir est à une médecine de précision, centrée sur le patient et personnalisée. Pour développer de nouvelles opportunités thérapeutiques, améliorer le suivi et la prise en charge médicale, l'échange des données de santé informatisées sonne comme une évidence à un nombre croissant d'États et d'acteurs du monde de la santé. De nombreux obstacles freinent cependant encore le recours à ces données. Limitations techniques, contraintes financières, manque d'interopérabilité, respect de la vie privée et problèmes de sécurité, sont les entraves les plus souvent citées. Mais l'un des facteurs les plus importants susceptibles de freiner l'adoption généralisée de l'échange de données de santé est le soutien des patients eux-mêmes ! De leur consentement et de leur attitude à l'égard du partage de leurs informations médicales dépend en effet le développement des futures solutions et systèmes reposant sur l'utilisation des dossiers médicaux informatisés (DMI), celles qui sont issues de la vie réelle (Real World Evidence, RWE) ou provenant des résultats rapportés par les patients (Patient Reported Outcomes, PRO).
Perception des bénéfices...
De manière un peu étonnante, et malgré les bénéfices attendus du partage des données digitales, le défi que pose son acceptation par les patients est encore peu étudié. En 2017, Pouyan Esmaeilzadeh et Murali Sambasivan* ont cependant réalisé une revue de la littérature existante sur la question. Cent nonante-six articles publiés depuis 2005 ont été initialement extraits des bases de données. Sur ce total, trente-six répondaient aux critères d'inclusion et ont fait l'objet d'un examen complet. Qu'en ressort-il ? Que les bénéfices perçus sont un élément essentiel de la volonté des patients de contribuer au partage de leurs données médicales. « Les avantages potentiels de l'échange d'informations de santé, tels que l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins de santé, peuvent les persuader de donner leur consentement à ce type d'échange » notent-ils. Et si l'on en croit la revue faite par ces auteurs, il semble bien que cette approbation soit globalement au rendez-vous. Que nous disent-ils en effet ? Que la plupart du temps, « Les patients perçoivent plusieurs avantages associés aux technologies de partage de l'information médicale, tels que la commodité, l'accélération des soins grâce au partage de l'information, la haute qualité des soins et la réduction de la facture des soins de santé ». Ceux qui, parmi les patients, en font l'expérience, semblent même appuyer avec enthousiasme les initiatives gouvernementales visant l'adoption et la mise en œuvre à grande échelle des technologies de partage de données médicales. Certains sont même prêts à recommander les médecins qui ont recours à de tels outils à leurs amis ou aux membres de leur famille !
Et des risques
Attention, nous avertissent cependant les auteurs : « Les consommateurs peuvent, sur le plan conceptuel, soutenir le développement des technologies de l'information sur la santé et des infrastructures qui permettent l'échange de données médicales, mais il n'est pas garanti qu'ils soient véritablement prêts à échanger leurs informations de santé personnelles ». Ainsi, si les patients semblent prêts à donner leur consentement au partage de leurs données médicales, il apparaît qu'ils sont aussi très soucieux des questions liées à la transparence, la protection de la vie privée, la sécurité, le contrôle individuel impliquant qui peut accéder aux données et dans quel but. « Les études montrent que les patients sont plus susceptibles de confier leurs renseignements médicaux aux professionnels de la santé mais moins disposés à partager ceux-ci avec d'autres intervenants comme les administrations publiques, les assureurs ou les chercheurs. Ils ne veulent pas non plus que leurs renseignements personnels soient divulgués à des fins autres que les soins cliniques. En cas d'accord de principe, les patients peuvent cependant ne pas être disposés à partager les informations confidentielles à des médecins, même si elles sont essentielles à leur traitement, s'ils ne sont pas certains de la confidentialité qui est accordée à ces données », soulignent les auteurs.
Nouvelles stratégies
Dans le contexte spécifique des États-Unis, ceux-ci appellent de leurs vœux une meilleure protection des données personnelles des utilisateurs. D'un point de vue plus général, ils plaident également pour que des efforts supplémentaires d'information soient réalisés à destination des patients. « Quand les patients sont conscients des avantages potentiels liés au partage des données, ils sont plus susceptibles d'appuyer les initiatives dans ce domaine », expliquent-ils. De nouvelles approches stratégiques en matière de confidentialité sont également nécessaires, relèvent-ils enfin. « Les décideurs devraient concevoir de nouvelles stratégies pour garantir le droit des patients au consentement éclairé afin de mieux tenir compte des risques réels et perçus pour la vie privée et la sécurité du partage de données médicales. Les patients sont plus susceptibles d'endosser celui-ci lorsqu'ils sont convaincus que les avantages potentiels l'emportent de loin sur les risques possibles ».
Confidentialité et éthique, l'exemple d'Andaman7
Andaman7 est une application mobile centrée sur le patient (le projet lui-même est géré par des patients). Son premier but est de permettre à tout patient de gérer ses propres données médicales mais aussi celles de ses proches (enfants, conjoint, parents, ...). Les données étant uniquement stockées sur le smartphone, la confidentialité et la sécurité sont maximales: aucune donnée n’est stockée dans le cloud. Seul le patient a accès à ses données. Mais Andaman7 permet aussi le partage de données, de manière simple et fortement sécurisée. Et toujours à l’initiative du patient. Celui-ci décide toujours s’il désire partager des données, lesquelles et avec qui. Ce partage peut d’ailleurs être interrompu à tout moment. Et c’est là que Andaman7 brille : elle permet également de contribuer à la recherche médicale (RWE, Patient Reported Outcome / PRO, études cliniques, …) et aux soins à domicile ou hors hôpital. La plateforme peut être intégrée avec des outils existants dans les hôpitaux pour faciliter le contact avec les patients. Ceux-ci sont alors invités à participer à des études cliniques, à des trajets de soins, du monitoring à distance... mais toujours après consentement explicite du patient. Cela fait d’Andaman7 une des premières plateformes au monde à être véritablement centrée sur le patient, à ne pas stocker de données dans le cloud et à néanmoins faciliter la recherche médicale et les soins, sans aucun compromis sur la vie privée ou la sécurité. Dans le cadre de son projet social, Andaman7 est disponible gratuitement pour tous les utilisateurs individuels (médecins – et autres professionels de la santé – comme particuliers). Les contributions financières proviennent des hôpitaux et de la recherche médicale, au travers de l'accès aux patients et à leurs données de santé. Dans le cadre d’études cliniques ces données peuvent même être anonymisées.
* (Source) Patients’ support for health information exchange: a literature review and classification of key factors.
Articles recommandés : Généraliser l'e-santé pour améliorer la qualité de vie et la prise en charge des survivants du cancer